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COMMENT LIRE LE ZOHAR ?

     Il n'y a pas une seule bonne façon de lire le ZOHAR et de progresser, mais il est possible de souligner certains aspects et suggérer quelques lignes directrices.

       Tout d’abord, il faut savoir que le Livre du ZOHAR est dynamique et plein de surprises. Par exemple, souvent nous sommes amenés à lire que ‘RABBI ḤIYA et RABBI YOSSÉ allaient en chemin’, marchant parmi les collines de Galilée et partageant les secrets de la TORA, mais aussi en évoluant d’un Degré Spirituel à un autre, accompagnés par la CHEKHINA, la PRÉSENCE DIVINE Elle-même.

      Qui sait quels personnages ils vont rencontrer sur la route ? Un enfant les étonne par sa Sagesse, un mendiant les enrichit de précieux enseignements, un ânier âgé apparemment acariâtre se révèle être un Sage déguisé.

       Vous êtes sur le point d’entrer dans un domaine enchanté. Certes, bien que le ZOHAR puisse parfois être perçu comme un ouvrage mystique, n’oubliez pas qu’il s’agit avant tout d’un commentaire de la TORA. Il est donc souhaitable d’avoir la TORA à portée de la main pour vérifier le contexte original, pour voir comment tel ou tel verset en particulier va servir de tremplin pour attiser l’imagination.

    Toutes les deux ou trois pages, nous lisons : ‘RABBI ḤIYIA commença [littéralement : ouvrit]’, ‘RABBI YOSSÉ commença’. Cela signifie que non seulement chacun commençait son propos mais qu’il ‘ouvrait’ aussi le sens du verset : il dévoilait ainsi de nouvelles façons de saisir le sens, et il élargissait le champ de l’interprétation. 

Le lecteur du ZOHAR doit lui aussi être ouvert : ouvert à de nouvelles façons de penser et de concevoir. Ainsi, les Compagnons ne cessent de dire : ‘Viens, et vois !’ 

       Le ZOHAR est fermement ancré dans la Tradition, mais il est aussi riche en découvertes de nouvelles interprétations. ‘Ce verset a déjà été discuté, mais venez et voyez !’ ‘Le sens de ce verset a été établi, mais venez voir !’ ‘Ici, il est nécessaire d’apporter des innovations à la TORA !’ L’interprétation nouvelle apparaît en scrutant attentivement le Texte de la TORA. Ainsi, le questionnement devient une valeur suprême.

       Après que RABBI ḤIZKIYA eut posé une question difficile à RABBI ABBA, il nous est dit que ‘RABBI ABBA vint et l’embrassa’. Pourquoi ? Parce que, comme le note ici un commentateur, ‘la question est déjà la moitié de la réponse ; sans question, il n’y a pas de raison de répondre’.

       Même quand le sens d'un verset est parfaitement clair, le ZOHAR peut remettre en question sa structure, en la sondant parfois si profondément que le lecteur en reste stupéfait.

      Pour prendre un exemple extrême, ‘viens, et vois’ comment RABBI EL’AZAR interprète le verset qui se trouve à la fin du récit se rapportant au Jardin d’EDEN, et qui ne saurait être plus explicite : « Il chassa ADAM ». ‘Nous ne savons pas qui a divorcé de qui : si le SAINT, loué soit-Il, a divorcé d’ADAM, ou non’. Comme RABBI EL’AZAR le démontre par un artifice exégétique, la signification mystique est l’alternative choquante qui se dissimule à l’intérieur de cette expression anodine : « ou non ». Adam a divorcé de la CHEKHINA, il L’a chassée, la séparant ainsi de son Partenaire Divin, TIF’ERET, et en même temps de lui-même. 

    Autrefois, tout comme ADAM, l’humanité était ‘mariée’ avec le CRÉATEUR. La faute originelle réside dans la perte de l’intimité qu’avait ADAM avec le Divin, ce qui a entraîné la diminution de sa conscience qui était auparavant illimitée. La cause de cette perte est d’avoir goûté le fruit de la connaissance rationnelle ; c’est le prix que nous payons encore aujourd’hui pour parvenir à la maturité et à la culture. Le défi spirituel consiste à rechercher ce Trésor perdu, sans renoncer à soi ni au monde.

    Au cours de votre lecture, observez de quelle manière les Compagnons dégagent un sens nouveau à partir d’un verset, d’une phrase, d’un mot ou même d’une lettre de la TORA. Souvent, ils s’appuient sur des techniques d’interprétation rabbiniques classiques, telles que l’analogie verbale : ‘Ici, il est écrit : [telle ou telle expression], et là il est écrit : [une expression identique (ou presque)]’, ce qui implique qu’il y a un lien étroit entre ces deux expressions.

       Le saut franchi par l’interprétation herméneutique peut être long, très éloigné du sens littéral. Mais il peut aussi se produire qu’un verset soit lu de façon ‘hyperlittérale’, en ignorant l’usage idiomatique au profit d’un sens radicalement spirituel.

     Par exemple, lorsque le CRÉATEUR ordonne à AVRAHAM, « לֶךְ־לְךָ (LEKH LEKHA), Va vers le Pays que Je te montrerai … » (Genèse 12:1), RABBI EL’AZAR insiste pour que ces mots soient lus de façon plus littérale que ce que leur sens premier signifie : LEKH LEKHA, ‘Va vers toi-même !’

      Une autre illustration surprenante est la lecture que fait le ZOHAR des premiers mots de la TORA. Ceux-ci sont en général traduits par l’expression « Au Commencement le CRÉATEUR créa… ». Tout le monde suppose que ce verset décrit la Création de l’univers. 

   Mais pour le ZOHAR, ces mots font allusion à un autre Commencement qui est primordial : l’Émanation des SEFIROT à partir de EÏN SOF (‘L’INFINI). 

     Comment cette allusion est-elle découverte, ou inventée ? En insistant sur l’ordre précis dans lequel les mots sont écrits en hébreu : בראשית ברא אלהי''ם (BERECHIT BARA ELOKIM), qui est ainsi interprété : Au Commencement, (Il) a créé ELOKIM – c’est-à-dire que grâce à ḤOKHMA (la SEFIRA appelée ‘Sagesse’, connue également sous le nom de ‘Commencement’), Il (EÏN SOF, l’INEFFABLE) a émané [créé] BINA (la SEFIRA de la ‘Compréhension’, connue sous le NOM Divin ELOKIM).

       Il s’ensuit que le CRÉATEUR est l’Objet du verset, et non le Sujet ! La Réalité Divine ultime, EÏN SOF, transcende et fait pour ainsi dire exploser la conception confortable que nous avons du CRÉATEUR. Le ZOHAR entreprend avec audace de nous confronter avec cette Réalité, en transformant complètement l’histoire familière de la Création en biographie du Divin.

     En conséquence, lorsque vous décidez de vous lancer dans cette Aventure, attendez-vous à être surpris, et restez très vigilant. Les enseignements du ZOHAR sont profonds et intenses ; celui qui espère y entrer et en ressortir en paix doit faire preuve de prudence et persévérer tout en étant à la fois réceptif et actif. 

      Le message ne vous est pas servi sur un plateau ; vous devrez vous investir dans le Texte et participer à la recherche du sens. Suivez les mots vers ce qui se trouve au-delà et à l’intérieur ; ouvrez les Portes de votre imagination.

     Par-dessus tout, ne réduisez pas tout ce que vous lirez dans les pages du ZOHAR à quelque chose que vous connaissez déjà. Méfiez-vous d’essayer de trouver ‘l’essence’ d’un enseignement particulier. Bien que l’essence soit en général le but de la recherche mystique, ici l’essence ne convient pas si elle ne vous stimule pas à explorer des couches toujours plus profondes, à remettre en question vos a priori sur la Tradition, le CRÉATEUR et vous-même. Pour reprendre les termes d’une parabole zoharique :

      Il y avait un homme qui vivait dans les montagnes. Il ne savait rien au sujet de ceux qui vivaient dans la ville. Il semait du blé et mangeait les grains crus. Un jour, il entra dans la ville. 

     On lui offrit du bon pain. L’homme demanda : ‘C’est pour quoi ?’
     On lui répondit : ‘C'est du pain, pour manger ! Il mangea, et le goût était très bon. Il demanda : ‘De quoi est-ce fait ?’
     On lui répondit : ‘De blé.’
    Plus tard, on lui offrit des pains épais pétris à l’huile. Il les goûta et demanda : ‘De quoi sont-ils faits ?’
     On lui répondit : ‘De blé.’
    Plus tard, on lui offrit de la pâte royale pétrie avec du miel et de l'huile. Il demanda : ‘De quoi est-ce fait ?’
     On lui répondit : ‘De blé.’
     Il dit : ‘Je suis le maître de tout cela, puisque je mange l’essence de tout cela : le blé’.

     À cause de cette façon de voir, il ignorait les délices du monde, qui étaient perdus pour lui. 


   Il en va de même pour celui qui saisit le principe, mais qui ne connaît pas tous les délices qui en dérivent et qui découlent de ce principe.
 
L’auteur du texte ci-dessus est le Professeur Daniel Matt
Traduction et adaptation : Michel Benhayim 

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