
פְּנִימִיּוּת חַג הַפֶּסַח וִיצִיאַת מִצְרַיִם
LA DIMENSION SPIRITUELLE
DE LA FÊTE DE PESSAḤ
ET DE LA SORTIE D’ÉGYPTE
1) Extériorité et Intériorité
Dans toute Réalité, quelle qu’elle soit, il y a deux aspects : son Extériorité et son Intériorité.
L’Extériorité est l’aspect apparent: celui de la matière, d’un être humain ou d’un événement donné. Cette Extériorité est perçue par nos sens et notre faculté de compréhension dont on sait qu'ils sont limités; et pourtant, aucun doute ne subsiste, cette Extériorité nous semble être la Réalité, ni plus ni moins.
L’Intériorité, quant à elle, est l'Aspect dissimulé de la Réalité, ce qu'il y a au-delà de ce que nous ressentons et de ce que nous comprenons. Cette Intériorité est la Dimension Spirituelle de ce qui nous entoure et de nous-mêmes.
La TORA fait partie de la Réalité. Elle a donc, comme tous les autres éléments de cette Réalité, une Extériorité et une Intériorité : dans chacun de ses récits et dans chacune de ses Mitsvot, ces deux aspects sont présents. Et si, pour quelque raison que ce soit, on décidait d'ignorer l’un d'entre eux, on n'aurait qu'une TORA sans KEDOUCHA, c’est-à-dire un simple texte profane.
La Fête de PESSAḤ et le récit de la Sortie d’Égypte ne font pas exception à ce principe. Et si nous connaissons, semble-t-il, les faits historiques et les Mitsvot qui en découlent, il nous appartient de découvrir la signification de ce récit, son Intériorité, pour nous ici et maintenant.
2) Quelle est la Finalité de la Création?
Pourquoi le CRÉATEUR a-t-Il créé l’univers et tout ce qu’il contient? Pourquoi nous-mêmes avons-nous été créés?
Est-ce pour accumuler sans cesse des biens matériels et de l’argent? Est-ce pour acquérir ce que l'on croit être un certain pouvoir et quelques petits honneurs? Ou peut-être serait-ce pour profiter des plaisirs de la vie dont la jouissance éphémère n’apporte que frustrations? « Vanité des vanités, a dit KOHELET (l’Ecclésiaste), tout est vanité ».
Les Sages de la KABBALA enseignent que lorsque l'ÉTERNEL a créé l’univers, Il a voulu prodiguer le plus grand des Plaisirs qu'un être humain puisse espérer ici-bas, à savoir la RÉVÉLATION, dans la NECHAMA, de Sa PRÉSENCE et de Sa BONTÉ. Cette RÉVÉLATION s’apparente à un DON, comme tout ce qui émane de l'ÉTERNEL. Pour que cette RÉVÉLATION puisse se dévoiler, il fallait doter l’être humain d’une ‘volonté de recevoir’, car rien ne peut être donné si cette volonté n'existe pas.
Un problème important survient quand l'être humain utilise cette volonté de recevoir à des fins personnelles, sans se soucier des autres ni de la VOLONTÉ DIVINE ; son ego va alors enfler de façon démesurée et cet être finira par ne penser qu'à lui, rien qu’à lui, toujours à lui. Chaque fois qu'il fautera, ce sera parce qu'il aura ignoré ce que le CRÉATEUR attend de lui. Et alors, tôt ou tard, viendra le moment où il faudra rendre des comptes.
En bref, le CRÉATEUR a donné à l’être humain la volonté de recevoir pour qu’il l’utilise à bon escient, c’est-à-dire pour qu'il s’efforce, par l’étude, l'accomplissement des Mitsvot et de bonnes actions, de découvrir Sa PRÉSENCE. Si l'être humain préfère vivre centré uniquement sur lui, le jour viendra où il ne lui restera plus que les yeux pour pleurer.
3) Que signifie l’expression KLIPPAT MITSRAYIM ?
Avant de goûter une orange, il est nécessaire d'enlever d'abord la peau qui la recouvre ; de même, pour manger une noix, il faut enlever sa coque. Dans l’un et l’autre cas, il faut ôter la קְלִפָּה KLIPPA ‘la peau, la coque…’ qui enveloppe et protège le fruit.
Il en est de même dans le Domaine Spirituel : si l’on n’enlève pas ce qui empêche de percevoir la קְדֻשָּׁה KEDOUCHA ‘Sainteté’, on ne pourra pas servir l'ÉTERNEL comme il convient. Quelle est cette KLIPPA qui constitue un obstacle infranchissable ? C’est ce qui est appelé dans le langage métaphorique de la KABBALA : קְלִפַּת מִצְרַיִם KLIPPAT MITSRAYIM. À partir du récit de l’esclavage des Bnei Israël en Égypte, les kabbalistes ont développé ce thème en lui conférant une valeur symbolique.
De quoi l’être humain est-il en général l’esclave ? Et ils ont répondu : de son égoïsme. Selon l’expression utilisée par Rav Yehouda Ashlag, il s’agit de ce qu’il appelle הָרָצוֹן לְקַבֵּל ‘la volonté de recevoir pour soi-même’, uniquement pour soi. Cette volonté égocentrique qui consiste à recevoir des bienfaits et des plaisirs est souvent la motivation essentielle qui réside dans le cœur de chaque être humain, depuis sa naissance et parfois jusqu’à sa mort.
Pour percevoir la similitude qu'il y a entre le récit de l’esclavage en Égypte et la volonté de recevoir, on peut constater que le mot מִצְרַיִם (Égypte) a, en raison de son suffixe, une forme grammaticale duale ; il fait ainsi allusion à deux צָרוֹת ‘confinements’ ou ‘malheurs’ qui sont: d’une part, צָרוּת עַיִן ‘l’étroitesse du regard’, c’est-à-dire : ‘la jalousie’ ; et d’autre part צָרוּת לֵב ‘un cœur étroit’ : ‘l'avarice, la mesquinerie’.
Cette KLIPPAT MITSRAYIM engendre une séparation entre le CRÉATEUR et les créatures, entre Celui Qui veut donner en permanence et les êtres humains dont la voix intérieure ne cesse de réclamer : 'donne, donne, donne'… Il y a là deux attitudes opposées qui ne peuvent pas communiquer entre elles. Ce n’est qu’à l’âge symbolique de la Bar Mitsva, lorsque l’on s’imprègne progressivement du message profond contenu dans la TORA et les Mitsvot, que l’on peut recevoir la ‘LUMIÈRE qui est dissimulée dans la TORA’. Alors que sa nature initiale est proche de l’animal, l’être humain va peu à peu changer et se transformer en un Homme ou une Femme digne de ce nom.
4) Sortir d’Égypte : un sujet toujours actuel
Mais nous pouvons constater que nous ne sommes pas encore arrivés à ce DEGRÉ, loin s'en faut. La raison pour laquelle nous sommes toujours esclaves de notre égoïsme est donnée par le Rav Ashlag dans son ‘Introduction au Livre du Zohar’ :
‘Tous ceux qui s’occupent de la TORA négligent leur propre Intériorité ainsi que celle de la TORA. Ils la délaissent comme si c'était quelque chose qui ne sert à rien dans le monde ; au mieux, ils ne s’en occupent qu’à un moment qui n’est « ni le jour ni la nuit » (Zacharie 14, 7), et devant elle, ils sont « comme des aveugles qui tâtonnent contre un mur » (Isaïe 59, 10). En agissant ainsi, ils renforcent leur propre extériorité, c’est-à-dire les besoins de leur corps [leur égoïsme] et ils attachent plus d’importance à l’extériorité de la TORA qu’à son Intériorité.
Dans une telle génération, ceux qui commettent des destructions et qui se trouvent dans les Nations du monde relèvent la tête ; ils veulent tuer et massacrer, surtout les Bnei Israël, comme l’ont dit nos Sages : ‘Aucun malheur n’arrive dans le Monde, si ce n’est à cause [du comportement] d'Israël’ (Tevamot 63a).
C’est ce qui est écrit dans les Tikkounim (complément au Zohar) : ‘ceux qui se désintéressent de la SAGESSE de la KABBALA entraînent la pauvreté, les guerres, les pillages, les massacres et les exterminations dans le Monde entier’ (Tikkounei HaZohar 30, 2).’
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