Le Mois de Eloul: le Mois de la Techouva

Le Livre de la Vie

En ce mois d'Eloul, nous abordons la nouvelle année avec crainte et inquiétude. Nous avons vu Israël, doublement menacé par les missiles et les tunnels du Hamas, contraint de faire certains des choix les plus difficiles qu'une nation ait jamais eu à faire. Comment mener une guerre contre le terrorisme lorsque les terroristes prennent tout un peuple en otage et cachent des bombes et des lance-roquettes dans les écoles, les hôpitaux et les mosquées ?

Comme l'a dit Amos Oz, que feriez-vous si votre voisin d'en face s'asseyait sur son balcon, installait son petit garçon sur ses genoux et se mettait à tirer à la mitrailleuse sur votre chambre d'enfant ?

La Tora enseigne que lorsque Jacob était sur le point de rencontrer Ésaü, après une séparation de 22 ans, il était « très effrayé et angoissé ». Rachi précise : « très effrayé », à l'idée d'être tué; « angoissé », à l'idée de devoir tuer. Les commentateurs de Rachi posent la question suivante qui semble évidente. On a le droit de tuer en légitime défense. Alors pourquoi Jacob était-il angoissé à l'idée de devoir tuer un homme qui était sur le point de le tuer ? La réponse brève est que si la vie est importante pour vous, vous êtes angoissé, même si sur le plan moral vous avez raison. Le Peuple en Israël doit se défendre, mais il le fait sans joie, seulement avec angoisse.

C'est précisément à ce moment-là que l'antisémitisme a refait surface avec virulence dans les rues d'Europe, l'antisémitisme traditionnel de l'extrême droite et de l'extrême gauche, mais aussi le nouvel antisémitisme celui qui diabolise Israël et ne recherche pas la paix, mais la destruction.

J'ai ressenti une vague de peur déferler sur le monde juif. Est-ce que c'est fini ? Après toutes les larmes et les tragédies du passé, devons-nous encore vivre dans la peur ? L'histoire juive doit-elle être ressembler à un jour d’anxiété sans fin ? Les choses ne peuvent-elles pas changer ?

Je pense que l'une des réponses réside dans le mot-clé de cette période de l'année juive : תְּשׁוּבָה Techouva, c’est-à-dire le Repentir.

Je pense que la Techouva est l'une des notions les plus remarquables qui aient jamais traversé l'esprit humain. La Techouva nous enseigne que l'histoire peut changer parce que nous pouvons changer. Notre tempérament n'est pas prédéterminé par nos gènes. Nous pouvons agir différemment demain par rapport à hier. Les ennemis d'hier peuvent devenir les amis de demain. C'est ce qui s'est passé entre Israël et l'Allemagne, Israël et l'Égypte, Israël et la Jordanie. L'histoire peut changer parce que nous pouvons changer et que nous sommes les artisans de notre histoire. Et ma prière la plus profonde cette année est que les ennemis d'Israël, ses voisins, changent eux aussi, car alors nous pourrons, ensemble, écrire un nouveau chapitre de l'histoire du Moyen-Orient, un chapitre de joie et non de détresse.

Mais pensez un instant à Israël. Les Juifs n'avaient pas formé d'armée depuis la révolte de בַּר כּוֹכְבָּא Bar Kokhba, il y a près de 19 siècles, mais ils l'ont fait avec brio pour défendre leur Terre. Pendant près de deux mille ans, les Juifs ont rarement été agriculteurs, mais en Israël, ils sont devenus les plus grands innovateurs agricoles du monde. En raison des vicissitudes de l'histoire juive, aucun peuple n'a changé de manière aussi spectaculaire et aussi fréquente que les Juifs, et pourtant, malgré tout cela, nous sommes restés fidèles à nos principes fondamentaux : la justice, la mansuétude, l'amour de la vie, l'amour des enfants, l'amour de l'étude, la discussion et la vie intellectuelle.

Comme il est écrit: וּתְשׁוּבָה וּתְפִלָּה וּצְדָקָה מַעֲבִירִים אֶת רֹעַ הַגְּזֵרָה "Le repentir, la prière et la charité peuvent détourner le mauvais décret (Talmud de Jérusalem, Ta’anit 2-a). Il n'y a rien d'inévitable dans les affaires humaines. Le plus grand cadeau que HACHEM nous ait accordé est la capacité de changer. Les Juifs n'acceptent jamais la défaite. C'est pourquoi, après tous les coups durs de l'histoire, nous sommes toujours invaincus.

Oui, ces derniers temps ont été très difficiles. Mais réfléchissez à ceci : en près de 4 000 ans d'histoire juive, nous n'avons jamais connu à la fois l'indépendance et la souveraineté en Terre d'Israël, ainsi que la liberté et l'égalité dans la plupart des autres pays. Pour paraphraser un vieux dicton ḥassidique : si les choses vont si mal, comment se fait-il qu'elles aillent si bien ?

Cette année, en ce mois de Eloul, remercions d'abord HACHEM pour tout ce qu'il y a de bon dans la vie juive, puis demandons-Lui de nous donner la force de changer le reste.

Rav Jonathan Sacks

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